Peau d'Ane n'a pas de pot, épisode 4.

Publié le par Le Rat Mort

podan.pngAVERTISSEMENT: Cet épisode est sans doute le pire de la série. Âmes sensibles s'abstenir

 

 

 

 

 

 

 

Ce n'était qu'un âne hors d'âge, dont la carcasse mourante perçait la peau élimée. Mais les testicules pendouillant entre ses pattes arrières tremblotantes prouvaient qu'il devait encore être bon à quelque chose. La Princesse n'eut que peu d'efforts à faire pour lui soutirer une cinquième patte, presque vigoureuse. Puis elle enlaça l'animal, quelque peu surpris de se voir un cavalier dans ce sens là. Le brave se dit que l'occasion ne se présenterait certainement plus, et cambra ses reins au dessus de la jeune fille. Une description plus précise ferait de ce texte un rebut de l'enfer, et priverait vos imaginations de débordements aléatoires, aussi je laisse à chacun le soin de portraitiser en esprit ladite étreinte.

 

Toutefois, l'âne, je l'ai dit, était vieux. Et, dans un trop plein de soumission à la princière volonté, ses membres défaillirent, son cœur éclata dans son poitrail efflanqué, et il s'effondra sur la demoiselle.

Il faut savoir que même squelettique, un âne mort pèse un âne mort, et malgré moult gesticulations, poussées, roulades, la Princesse ahanant sous l'âne ne parvint pas à se défaire du fardeau qui oppressait sa poitrine. Le souffle comprimé par le cadavre lui manquait pour appeler à l'aide, et elle battait en vain la paille de ses bras blancs. L'animal, en s’abattant sur elle, s'était fracassé la cage thoracique, et elle se sentait poisseuse d'un sans encore chaud. L'instinct de survie nous dicte parfois ce que seuls de conteurs perversement saugrenus sont à même d'imaginer. En se tortillant quelque peu, elle parvint de sa douce main à atteindre la blessure, et commença de l'élargir, écartant les côtes, arrachant les poumons flasques par lambeaux, creusant dans les organes du corps raidissant. Elle travailla toute la nuit à désentrentripailler l'âne, allégeant, intestins après estomac, le poids qui pesait sur elle. Elle étripait et éventrait de ses mains délicates, se blessant aux éclats d'os et sentant monter en elle une affreuse nausée.

Lorsque vint poindre l'aube, elle avait assez travaillé pour repousser les restes de l'âne vidé de ses organes, dont seules restaient la peau la lourde tête et les pattes. La princesse dégoulinait de sang, des parties de boyaux pendaient sur son corps et les vapeurs des intestins asins la baignaient. Mais enfin, elle était libérée de l'infâme carcasse, et son horrible labeur avait dans le même temps calmé ses ardeurs lubriques. Frissonnant dans le matin brumeux, elle se couvrit de la pelure qu'elle avait laissé pour remonter dans ses appartements.

Pour son malheur (et pour enrichir le conte), un enfant l'aperçut. Silhouette d'âne sur deux jambes, dans des relents d'entrailles et de fumier, maculé de sang, la Princesse était à faire peur. Le gamin, venu chiper des œufs avec quelques uns de ses pairs, hurla alors au démon, et jeta une pierre à la créature qui s'avançait. A ce cri, toute la horde de tête à claques pilleurs de poulaillers sortit en furie, et la pauvre fut lapidée par tout ce qui tombait à leur portée (hors les œufs dérobés, parce qu'on peut chasser le démon, mais faudrait voir à pas non plus se déplacer pour rien). Peau d'Âne, -car je peux désormais cesser de trouver des synonymes médiocres pour la nommer ainsi- Peau d'Âne donc s'enfuit faiblement de la cour du château, courant loin de ses enfantins bourreaux, et se retrouva dans la forêt, à la recherche de quelqu'appui. Elle aurait pu chercher refuge auprès de son père, qui aurait sans doute râlé un peu, mais qui ne l'aurait pas reniée pour si peu. Mais la princesse, épuisée, affolée, terrifiée, et aussi un peu tarte, ne sut pas retrouver entre les arbres les traces subtiles d'un convoi de cent cinquante chevaliers, vingt chariots et deux cents chasseurs à pied. Aussi, comme on s'en doute, elle s'égara tel Hélène dans le mauvais chemin.

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article